24 avril 2024

Alerte à la catastrophe ! : un livre révolutionnaire

Brève réponse à un article paru dans le magazine ‘Partisan’ no. 6, de l’automne 2016 sur un livre du MLPD paru en mars 2015.

  1. Sur l’unité Homme et Nature – un point de vue non marxiste

L’article butte sur l’affirmation du livre qu’il faut rechercher « l’unité fondamentale de l’homme et de la nature ». Ici, on reproche au MLPD de ne voir que l’unité et pas la contradiction. Rappelons une des lois de la dialectique formulées par Mao: « un se divise en deux ». Pour que cela soit possible il faut une UNITE. Par exemple le mode de production capitaliste est une unité qui se divise en deux: force productive/rapport de production (FP/RP). Effectivement, il y a les deux aspects et « Alerte » l’affirme tout au long de son analyse ! Mais il affirme que le principal est l’unité grandissante au cours de l’histoire humaine (de la société primitive au caractère double du capitalisme : des forces productives en plein déploiement et la soif de profit menaçant l’unité homme/nature). Pense-t-on que la contradiction est principale au lieu de l’unité entre l’homme et la nature ? Ça serait clairement rejoindre les positions du mouvement écologiste petit-bourgeois qui ne voit dans l’homme que l’ennemi de la nature.

  1. Le socialisme, nouvelle société ou non ?

Qu’est-ce que le mode de production socialiste ? Cette notion serait « une réalité qui n’existe pas». On ne pourrait parler que de mode de production communiste. Selon Marx, le socialisme est la première phase du communisme. La prise du pouvoir, la dictature du prolétariat (la DDP) et la transition n’existeraient-elles pas ? Le socialisme va socialiser les moyens de production et transformer l’ensemble du mode de production. Sinon, comment avancerait-on vers le communisme ? C’est ça, la lutte des classes au socialisme. Cette transition socialiste n’est elle pas une unité, un mode production, qui se divise en deux éléments FP/RP ? N’avaient-ils pas « une réalité » dans la transition socialiste en URSS, en Chine ? Cette transition était un tout réel et instable, en évolution soit vers une nouvelle unité, celle d’un mode de production communiste, soit un retour vers la restauration du capitalisme.

Le développement révolutionnaire des forces productives et la « théorie des forces productives ». 

Il faut comprendre la relation FP/RP. Dire par exemple que les FP sont l’élément dynamique et révolutionnaire de cette relation dérange l’auteur de l’article. Et pourtant on trouve abondamment dans la littérature marxiste cette notion de dynamisme des FP – le prolétariat en est d’ailleurs le principal élément – bouleversant constamment les rapports de production bourgeois jusqu’au saut qualitatif de la révolution.

Là encore l’article confond forces productives dynamiques et « théorie des forces productives » qui, dans la transition socialiste, ne verrait qu’un mécanisme unilatéral, économique poussant les RP à des modifications spontanée (cf. la critique de cette théorie dans la revue la Cause Du Communisme).

Doit-on avoir peur de la notion de  « productivité » ?

Le programme socialiste du MLPD parlerait de « réaliser une productivité grandissante du travail ». Le capitalisme a extraordinairement augmenté la productivité du travail — produisant 1000 ou 2000 fois plus qu’il y a un siècle ! Serait-ce une mauvaise chose ? Seul un point de vue petit bourgeois économiste (et ils sont encore nombreux aujourd’hui à le penser !) pourrait souhaiter un retour vers la petite production peu productive de richesses. La mécanisation, l’automatisation des systèmes de production sous le socialisme permettra non seulement de satisfaire de nombreux besoins humains, mais aussi de libérer du temps libre, de désaliéner l’humain, etc. L’article confond encore deux choses : la productivité et l’augmentation des cadences dans les entreprises capitalistes. Deux choses bien différentes.

  1. Lutte de classes et alliance de classes – autrement dit quelle stratégie ?

Le livre ne poserait pas les problèmes environnementaux spécifiques de la classe ouvrière, mais veut « placer (le prolétariat) sur le terrain de la petite-bourgeoisie »? Une critique tout à fait syndicaliste. Le livre ne parlerait pas des dangers dans les usines ? Le livre le fait à plusieurs reprises, mais ce que révèle la critique c’est l’incapacité à surmonter l’économisme qui limite le rôle politique des ouvriers aux usines. Oui, les ouvriers sont très exposés à la pollution dans les usines et l’exemple de l’amiante est certainement parlant, mais la catastrophe écologique, conséquence du mode de production capitaliste, fait déjà des dégâts un peu partout. L’enjeu devenant aujourd’hui : soit l’humanité mettra un terme au capitalisme, soit le capitalisme mettra un terme à l’humanité. La classe ouvrière se doit d’avoir un point de vue sur cette question.

Les alliances de classes : c’est une question de stratégie révolutionnaire. Le MLPD est clair : pas de révolution sans alliance de classes. Parler d’alliance de classe dans la lutte pour la prise du pouvoir signifie que la classe ouvrière et le prolétariat en général doivent isoler la grande bourgeoisie au pouvoir en s’appuyant sur toutes les contradictions qui naissent de l’intérieur du mode de production capitaliste. Sur ces questions, on ne peut faire l’impasse sur toutes les explications données par le livre concernant le « syndicat des écologistes » : c’est une organisation de masse pour la cause écologiste (ce que ne sont pas les syndicats industriels, dans lesquels les ouvriers conscients doivent bien sûr mobiliser pour l’environnement également) qui se donne le nom de «syndicat» pour faire justement référence au rôle des ouvriers.

Ce syndicat des écologistes – selon la critique – « mettrait la classe ouvrière à la remorque de la petite-bourgeoisie »… « loin d’avoir bâti, dans la lutte contre la politique petite-bourgeoise précisément, leur indépendance politique autour d’une écologie révolutionnaire. »

Trois remarques : 1) l’auteur n’a pas trop confiance dans la classe ouvrière dans sa lutte contre les influences petite-bourgeoises. 2) Il faut démontrer comment la classe ouvrière acquiert d’abord son indépendance, pour ensuite être confronté à la politique petite-bourgeoise. 3) Est-ce possible dans un monde où la lutte de classe est permanente et où l’indépendance politique de classe se construit dans une lutte permanente contre les points de vu idéalistes ? Le problème étant quelle orientation politique positive (autrement dit quelle analyse scientifique) le prolétariat développera-t-il pour acquérir son indépendance et avoir un rôle dirigeant ?

  1. Les mobiles et les méthodes utilisés dans cette critique

En déformant les explications et l’essentiel du livre « Alerte », on arrive à dire qu’il serait marqué par le réformisme et l’opportunisme. Pour rabaisser la politique environnementale de l’URSS soviétique (qu’il juge d’un point de vue non historique et du point de vue dominant anticommuniste actuel), la critique va jusqu’à défendre l’impérialisme français pour mettre les deux au même niveau ! L’impérialisme français s’emploierait à protéger les espèces ! L’auteur en oublie les réalités actuelles : la disparition des insectes pollinisateurs, la surpêche et l’empoisonnement des sols… Il faut le faire !

La critique n’a pas de mots suffisamment méprisants pour qualifier ce livre : il « a des allures de catalogue », ce ne serait qu’« une compilation » et pour finir : « il est pernicieux». Tant de mépris et de suffisance pour cette œuvre collective et unique dans le mouvement marxiste-léniniste, sur un thème jusqu’ici réservé à la petite-bourgeoisie et à nos ennemis de classe.

Parler de « compilation » et de « catalogue », c’est ne pas voir la méthode dialectique dans l’analyse. Qui a le mérite par rapport à tous les écolos (qui ne voient que des aspects limités et isolés) de donner un aperçu des grands facteurs menaçant la vie sur Terre. Et le livre caractérise les conséquences des relations entre ces facteurs : on est en transition avancée et accélérée vers une catastrophe écologique mondiale – thèse confirmée jour après jour. « Alerte à la catastrophe » révèle le principal responsable : le système impérialiste mondial. Il est un puissant plaidoyer pour la révolution socialiste internationale. Le ton de la critique n’est en rien constructif et solidaire, mais malicieux. Il rompt la possibilité de combat commun de classe contre la barbarie capitaliste. Il tourne le dos à l’unité des marxistes-léninistes dans un processus critique et autocritique pour la lutte pour le communisme. Suivre cette logique c’est rester dans son coin, sectaire et ultra-gauche.