4 décembre 2024

Il y a 100 ans, les ouvrières d’usines de sardines du Finistère étaient victorieuse

L’histoire des Pen Sardin, une histoire ouvrière !

Leur lutte a été emblématique parce qu’elle a été organisée par des femmes qui ont mené une grève exemplaire et par leur action qui a marqué l’histoire du monde ouvrier.

Ces ouvrières d’usines de sardines du Finistère étaient surnommées les Penn sardin, tête de sardines en breton, en raison de leur coiffe si particulière qu’elles portaient pendant leur travail.

Elles vivaient dans une grande précarité avec des conditions de travail effroyables digne d’un livre de Zola, selon Charles Tillon. Leurs salaires étaient inférieurs à ceux des hommes et bien souvent la charge de la famille reposait sur leurs épaules. Les horaires de travail imposaient aux femmes d’être disponible à tout moment du jour et de la nuit.

Dès 4 heure du matin, résonnait le bruit des sabots des femmes courant dans les rues de Douarnenez pour se rendre à l’usine. En effet, dès qu’un navire sardinier revenait au port, les femmes devaient se rendre à l’usine, les sardines devant être préparées le plus vite possible. A cette époque la conservation par le froid industriel n’existait pas, les poissons devaient être travaillé dès leur arrivé.

La durée moyenne du temps de travail était de 16 h par jour et la journée se terminait vers 3 ou 4 h du matin. Autant dire que ces femmes étaient épuisées mentalement et physiquement par de telles conditions de travail. Le sommeil et la santé de ces femmes étaient ainsi sacrifiés en permanence. D’ailleurs pour rendre ces temps de travail légitime les patrons ont fait valoir une dérogation. Aussi, les familles étaient dans l’obligation d’envoyer les fillettes qui travaillaient à l’usine lorsqu’elles atteignaient l’âge de 10 ou 12 ans parce que leur survie dépendait également de leur maigre salaire.

Plusieurs témoignages ont été recueillis et les récits sont épouvantables comme celui de Malvina qui raconte avoir attendu des heures avec son frère, sans manger, sa maman retenue à l’usine pour 20 cts de l’heure. Ou bien celui de Marie-Anne qui a vu mourir avant 30 ans trois de ses filles, fragilisées pour avoir travaillé trop tôt, à partir de 12 ans.

Nous ne pouvons pas parler de ces ouvrières sans parler de leur chant. Afin de soutenir le rythme de travail, de supporter le froid, l’odeur de l’usine, de résister à la fatigue, d’accomplir les tâches pénibles, les sardinières chantent ensemble. Ces chants leur permettent également d’égayer leur journée et d’ouvrir un espace de liberté pour s’exprimer sur leur condition de travail. Ces chants sont comparables aux chants des esclaves noirs qui étaient exploités dans les propriétés agricoles.

Malgré cette vie de labeur, les Penn sardin font preuve de dignité en mettant un point d’honneur à venir travailler apprêtées dans des beaux habits accompagnés d’une belle coiffe. D’ailleurs cette coquetterie faisait grincer les dents des patrons d’usines qui ne comprenaient pas cette lubie pour de simples travailleuses. C’est dans le contexte de la grève qu’interviennent les syndicalistes de la CGTU : Lucie Colliard et Charles Tillion.

Importante figure du syndicalisme, Lucie Colliard était une institutrice qui apporta son savoir de militante féministe et elle accompagna les Penn sardin à structurer leurs revendications. Elle a notamment aidé ces femmes à prendre conscience de leurs droits, à établir leurs revendications et enfin à s’organiser collectivement. Lucie Colliard par l’éducation populaire et par son soutien a permis à ces femmes de trouver la voie de leur émancipation.

Le résultat de ce travail revendicatif a eu pour effet de mettre en confiance les sardinières et par convaincre à leurs tours les collègues de travail. Un formidable élan de solidarité populaire s’est également mis en place dans la région. Les commerçants ont contribué à la mobilisation en fournissant des produits alimentaires gratuitement aux grévistes.

Les sardinières font la démonstration de leur détermination pendant 6 semaines pour aboutir à une victoire totale le 6 janvier 1925 en faisant plier le patronat face à leurs revendications.

Extrait de l’intervention de l’UD CGT de Paris rendant hommage à ces ouvrières.

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