20 avril 2024

Le SNU, une préparation à la guerre

Bernard Baissat, de l’Union Pacifiste (membre du Collectif) signait au mois de septembre un article paru dans divers journaux. Un article qui documente bien sur cette tendance croissante à une nouvelle  guerre mondiale.
Toutefois nous avions dit et écrit dès le mois de mai et en lien avec les débats au sein du Collectif (dont l’UPml est membre depuis le début) que nous pensions qu’il nous fallait aller plus loin dans la dénonciation du SNU.
La pratique des « stages » SNU et les prises de position des portes-paroles du gouvernement Macron montrent que l’État français s’engage de plus en plus une militarisation de la jeunesse en ayant pour objectif la préparation de la guerre.

La pratiques des stages et les nouveaux propos gouvernementaux (voir en fin d’article) nous donnent raison. Cette évolution militariste n’a pas pour cause première un « mauvais »
gouvernement suivant une « dangereuse » politique — fort à parier qu’un autre gouvernement de «gauche» suivrait le même chemin.

D’ailleurs la militarisation est un mouvement mondial : augmentation des budgets militaires, renforcement des forces répressives intérieures, renforcement de la répression et encadrement
croissant des populations, … En cette période de crise grave du mode de production capitaliste les tensions et les rivalités entre grandes puissances impérialistes font craindre un danger de guerre mondiale.

La guerre économique de plus en plus féroce pour l’accaparement des matières premières et des marchés pousse aux affrontement militaires comme nous le démontre la guerre en Ukraine.
C’est dans ce cadre-là qu’il faut voir la mise en place du SNU allant vers un service militaire obligatoire de 600.000 jeunes dans les années à venir : l’impérialisme a besoin de former de nouvelles «chairs à canon » !

L’article de Bernard B. mérite toute notre attention, il fournit des informations, des preuves de la militarisation des jeunes volontaires. Mais les « couac », les abus d’autorité ne peuvent être des accident de parcours. Au contraire ces faits pris dans leur totalité démontrent cette tendance accentuée à la guerre. (le comité de rédaction)

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” SNU 2022, l’armée en renfort

Le 13 juillet 2022, Macron a déclaré dans son discours aux forces armées : « « Je vous demande de faire davantage en donnant à nos réserves une nouvelle ambition et en investissant plus et mieux le grand projet du SNU que je porte…Il ne s’agit pas de militariser la jeunesse, encore moins la société, mais au moment où la nation a besoin de retrouver le sel de son histoire, son sens profond (…), la République a besoin que vous fassiez davantage… Je veillerai à ce que les ressources nécessaires y soient consacrées ». 

Le 31 août 2022, au cours du séminaire gouvernemental, Elisabeth Borne, annonce dans la feuille de route des Armées «  un investissement accru dans le service national universel ». 

Le 4 septembre 2022, le ministre des Armées Sébastien Lecornu déclare  : « Il y a un avant et un après 24 février », date du déclenchement de la guerre en Ukraine, «  La question de la résilience du pays, en cas de conflit ou de choc majeur, préoccupe les militaires, ils savent très bien qu’ils auront besoin du soutien de tous pour remplir leur mission…en cas de menace hybride ou de crise, les réserves peuvent (…) permettre aux armées de monter en puissance ».

Le chef d’état-major de l’armée de terre, le général Pierre Schill, souhaite recruter, avec l’aide du SNU, 10 000 jeunes par an pour effectuer un service militaire de six mois. 

Le président Macron poursuit donc, avec les armées, l’objectif dangereux qu’il avait clairement formulé, cinq ans plus tôt, quand il était candidat :  mettre en place un «  service militaire universel », afin de disposer d’un « réservoir mobilisable complémentaire de la Garde nationale » en cas de crise et de « renforcer le lien armée-nation ».

Depuis la mise en œuvre du SNU, le Collectif NON au SNU ne cesse de dénoncer l’embrigadement des jeunes qui doit faciliter le recrutement dans les armées et la gendarmerie. La préparation des esprits à de prochains désordres sociaux et à de prochains conflits militaires « de haute intensité » devrait favoriser, d’après le gouvernement, l’acceptation par la population d’un besoin accru de forces de répression et de forces militaires.

Pour la session 2022 le dispositif a rencontré des difficultés à

– motiver les jeunes: 35 000 recrues au lieu des 50 000 prévues.

– convaincre les parents et les formateurs: des personnels syndiqués de la jeunesse et des sports ont déclenché une grève pour ne pas être obligés de participer au SNU.

– recruter des encadrants: malgré les primes promises peu d’enseignants étaient candidats. Sarah El Haïry a dû solliciter les Armées.

Pas formés pour s’occuper d’adolescents le chef Alain M., lieutenant-colonel après une longue carrière dans l’armée de terre, et le cadre Jean-Pierre P-G., lieutenant de vaisseau pendant trente ans, ont provoqué un scandale dans un lycée de Strasbourg en imposant une punition collective nocturne à une centaine d’adolescents, pour une faute commise par deux jeunes filles.  L’affaire a fait grand bruit dans la presse locale et le directeur académique a quand même reconnu que « la dimension collective paraissait inappropriée ».

Des responsables de centre n’ont pas tenu compte des problèmes de santé survenus les années précédentes au cours des expositions au soleil des adolescents pendant les cérémonies militaires obligatoires.

À Vendôme, plusieurs des 150 jeunes alignés pour la cérémonie du 14 juillet, ont été victimes de malaises. Le sous-préfet, François Jouffroy en a conclu: « Pour tous ceux qui sont tombés, c’est que vous êtes allés au bout de votre effort. Il n’y a pas de mal à ça, soyez fiers »

Au lycée agricole du Bourbonnais de Neuvy, dans l’Allier, ce sont plusieurs jeunes, sur les 174 au garde -à-vous pour la cérémonie d’ouverture, qui se sont évanouis. Rien d’étonnant, selon Alexandrine Menegaut, chargée de mission SNU dans le département de l’Allier.. « Ils n’ont pas l’habitude de rester debout aussi longtemps, environ 1 heure 30, c’est très physique ».

Le journaliste du Quotidien de la Réunion raconte: « Dans les rangs, les quintes de toux se succèdent, agitant le spectre du coronavirus qui a dû mettre un terme au SNU guadeloupéen le 22 juin – comme l’a révélé, mercredi, un article du Canard enchaîné – et à celui de Somme-Vesle, dans la Marne, mercredi dernier. « Ce sont les effets du bivouac », temporise le préfet Jacques Billant, dans un sourire qui veut balayer les inquiétudes ». Un jeune remarque: « Je pense que c’est pour nous préparer à faire l’armée ! »

Effectivement voici quelques faits révélés par la presse régionale:

– Un journaliste  de l’Est Républicain relate la remise des diplômes de fin de stage: « Scène ahurissante : la rectrice d’Académie de la région Bourgogne-Franche-Comté, Nathalie Albert-Moretti passe en revue des élèves en uniforme et au garde-à-vous à Besançon. ».

– A Die, le rédacteur du Dauphiné note: « Le Service national universel a le vent en poupe. Les jeunes volontaires du SNU sont arrivés au pas cadencé en chantant devant les autorités pour la cérémonie de clôture de la session 2022 ». Les titres des chants ne sont pas précisés mais le correspondant de Nice Matin annonce: « Voici les 5 chants militaires que vous devez absolument connaître si vous faites votre service national universel: « Le chant des Africains »,”Vous n’aurez pas l’Alsace et la Lorraine », “Le Boudin », “La Madelon »,”La Strasbourgeoise ».

A Montauban, le 14 juillet,la Dépêche nous apprend que « Les jeunes du SNU ont défilé avec les régiments » et le Midi Libre note que « 90 jeunes filles et garçons, encadrés de vingt adultes issus de l’armée, de la gendarmerie, de la police nationale et de moniteurs, ont célébré la Fête nationale en présence d’anciens combattants. »

A Pontivy où 187 jeunes bretons ont fait leur SNU la sous-préfète Claire Lietard a déclaré, d’après Ouest-France: « C’est une alternative au service militaire ». 

A Montval-sur-Loir, Charlie Guillot, chef de centre dit: « Nous avons aménagé une place d’armes dans la cour du lycée, où tous les jours à 8 h 15, les jeunes procédaient à la levée des couleurs et chantaient la Marseillaise ». 

A Mayotte les volontaires ont rencontré la Légion étrangère. « Il s’agit d’un bon moyen d’avoir une première approche des métiers de l’armée » déclare un militaire.

La gendarmerie active ses associations de Cadets de la gendarmerie

Elle veut accueillir le plus possible de jeunes qui ont besoin de faire leur «  Mission d’intérêt général » pour valider leur SNU. Dans le Loiret, le Cher, les Vosges, le Lot, les Hautes-Pyrénées, partout, des gendarmes se mobilisent pour le SNU. « Nous avons toujours des besoins de recrutement et, à cet âge déjà, on peut susciter des vocations… Ce sont des jeunes qui sont particulièrement sensibles à ces métiers, observe un gendarme.

En septembre 2022, sur sa page Facebook, la gendarmerie de l’Aude lance un appel: « Si vous êtes âgés(es) de 16 à 18 ans, les cadets de la gendarmerie de l’Aude recrutent dans le cadre de la mission d’intérêt général du Service National Universel »

«  On a appris à manipuler des armes » se réjouit un adolescent lors de la visite de Sarah El Haïry à la caserne de gendarmerie Richemont à Nantes. « Vous entrez dans la grande famille des gardiens de la paix. Une rondache de la gendarmerie se porte et s’honore » répond la secrétaire d’État.

Le portefeuille de Sarah El Haîry, qui inclut le SNU, est maintenant rattaché à la fois au ministère de l’Éducation nationale et au ministère des Armées.

Cette nouveauté, décidée par Macron, correspond à la volonté du président de favoriser le recrutement dans les forces de l’ordre. Les déclarations de plusieurs adolescents interrogés sur leur participation au SNU sont révélatrices: « J’aimerais m’engager dans l’armée, et le SNU est une première expérience de la discipline et de la rigueur à avoir dans ce domaine. Pour l’instant je m’éclatedéclare le jeune J. M. qui fait son stage de cohésion à Cahors. Un Grenoblois de 17 ans souhaite « pouvoir faire sa Journée d’appel le plus rapidement possible afin de devenir volontaire dans l’armée. ». La jeune K. ajoute:« J’ai pu rencontrer des militaires, ça donne des idées pour l’avenir. » . A Bernay la jeune L. A. déclare: « Après, je vais m’engager en tant que réserviste, puis je pense me diriger vers l’armée de terre ou de l’air. ». A Montval-sur-Loir une adolescente actuellement en première année de cuisine restauration hésite après son stage de cohésion: « J’hésite entre devenir pâtissière et intégrer l’armée de terre ». Et à Saint-Hermine le jeune T. conclut:  « la plupart d’entre nous souhaitent devenir pompier, gendarme militaire ou policier. »

Quand le ministre de l’Éducation nationale Pap N’diaye déclare à Ouest France le 13 juillet 2022 au sujet du SNU: « Je ne vois pas ce qu’il y a de militaire dans les activités qui sont proposées aux jeunes » on comprend qu’il est mal informé. « Ce programme est bel et bien une entreprise de militarisation de la jeunesse, et non l’encouragement à l’exercice de la citoyenneté.” déclare Nara Cladera, co-secrétaire fédérale de Sud Education. « Dans l’atmosphère guerrière, les gouvernements s’apprêtent à embrigader la jeunesse…En Allemagne comme en France, dans un climat de tensions inter-impérialistes et de crise économique, il s’agit de préparer la population, et surtout la jeunesse, à ne pas rompre les rangs de l’union nationale et à accepter voire soutenir le militarisme rampant. » déclare l’éditorialiste de Convergences révolutionnaires.

Pour la rentrée 2022/2023 il est nécessaire d’affirmer à nouveau notre opposition au SNU. Dans une tribune de plusieurs membres du Collectif NON au SNU, publiée en juillet on peut lire: « Ce projet exhale ainsi de discrets remugles de la période des chantiers de jeunesse, instruments de la Révolution nationale de Pétain créés le 30 juillet 1940. S’il est exagéré de voir dans le SNU une pâle réplique de ces derniers, celui-ci partage néanmoins avec eux la vaste ambition d’inculquer à la jeunesse l’esprit de discipline ainsi que le sens de l’autorité et de l’obéissance…Juridiquement improbable, économiquement déraisonnable, politiquement inacceptable, le SNU ne peut qu’appeler une entière réprobation de notre part. C’est pourquoi nous disons et dirons inlassablement « Non au SNU ». 

La Fédérarion CNT-FO Éducation et Recherche affirme dans un communiqué: « Ce service militaire allégé, avec un stage en internat et en uniforme de 15 jours, pourra ouvrir à une intégration ultérieure dans la réserve militaire. Alors que le contexte mondial est de plus en plus guerrier et que les armées ont besoin de troupes, cette remilitarisation progressive de la jeunesse n’est pas anodine et doit être combattue fermement. »

Dans le Canard Enchaîné du 13 juillet Fanny Ruz-Guindos, titre son article: «  Service ( national) minimum »: «  Vingt malaises à Besançon, pareil à Nevers, dix à Dieppe…Les cérémonies du 18 juin, organisées entre midi et deux en pleine canicule, ont fait fureur. Au total, 31 participants ont fini aux urgences, selon l’Éducation nationale, qui, aux côtés des Armées, gère l’intendance…Chiffré à 2 140 euros par jeune – largement plus que deux semaines en colo – le SNU coûtera 1,7 milliard d’euros lorsqu’il mobilisera 800 000 jeunes par an, selon les voeux du président Macron ».

Benjamin Lucas, député écologiste NUPES des Yvelynes et Sandra Regol, députée écologiste NUPES du Bas-Rhin , ont publié un communiqué de presse à l’Assemblée nationale du 13/07/2022: Révélations de RUe89 Strasbourg: il faut en finir avec le SNU. «  Une nouvelle fois, le SNU montre qu’il est une réponse inadaptée aux urgences quotidiennes  et aux grands défis qui se présentent à notre jeunesse….La République et ses valeurs ne s’inculquent pas par des dispositifs de service militaire low cost. »

N’écoutons pas le ministre Pap N’diaye qui reconnaît que  « les choses ne fonctionnent pas comme nous le souhaitons » et propose de « réfléchir très sérieusement à une meilleure organisation » exigeons, avec le Collectif NON au SNU l’abolition immédiate de ce dispositif inutile et dangereux. 

Face aux menaces, la sécurité doit devenir « un enjeu collectif » selon le ministre des Armées, rapportait le journal Ouest France du 24/09/2022.

La société française doit préparer une réponse de l’ensemble de ses composantes face aux dangers cumulés auxquels elle est confrontée, estime le ministre des Armées Sébastien Lecornu, invité du forum Normandie pour la paix. Il a souligné le rôle crucial de la réforme du Service national universel.

“La leçon de l’Ukraine, c’est que c’est un peuple résilient. C’est autre chose qu’une facture de chauffage. Le don qu’ils font, c’est celui de leurs fils” , a déclaré le ministre des Armées Sébastien Lecornu lors d’un entretien accordé ce samedi 24 septembre à la rédaction d’Ouest-France sur son studio Agora au Forum Normandie pour la Paix à l’abbaye aux Dames, à Caen (Calvados).

« Cela ne peut pas être que l’affaire de l’État »

La force de dissuasion nucléaire et la puissance de ses forces armées placent la France dans un schéma différent de celui de l’Ukraine, estime-t-il, mais “nous sommes nous aussi vulnérables, il faut qu’on se prépare à d’autres formes de menaces. Cela ne peut pas être que l’affaire de l’État, ou des politiques.” .

Aujourd’hui, “un problème de sécurité quelque part dans le monde, ça se voit à la pompe, ça se voit dans une exploitation agricole du Calvados ou de l’Eure, ça peut se traduire par une attaque sur votre boîte mail.”

“On ne peut pas continuer comme avant, il y a forcément un schéma de contraintes que chaque citoyen va devoir intégrer, dans notre modèle de Défense” , a-t-il ajouté en soulignant la nécessité d’une capacité de résilience collective.

Il s’agit de pouvoir supporter, en même temps, “une pandémie, un attentat terroriste, et une guerre aux portes de l’Europe” , ainsi que les effets du dérèglement climatiques, qui touchent désormais outre-mer comme métropole.”

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Une nouvelle dimension pour le Service national universel ?

“Il faut qu’on réfléchisse à une dimension nouvelle du Service national universel (SNU) : comment prendre une classe d’âge et la préparer à tous ces risques ? Je pense qu’il y a un chemin autour de la vérité et du partage des contraintes. C’est ça la résilience” , a estimé Sébastien Lecornu, évoquant les travaux menés actuellement par Sarah El Haïry, secrétaire d’État chargée de la Jeunesse et du SNU.

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