Nous avons regroupé ici tout un dossier sur le développement de la résistance ouvrière et sur les voies de garage où veulent nous entraîner les directions politiques et syndicales réformistes.
La crise économique mondiale et structurelle dans le secteur automobile fait des victimes. 100 000 emplois ont été détruits dans la métallurgie en France ces dernières années, et 100 000 autres sont à craindre d’ici 2030. Actuellement, 180 entreprises annoncent des licenciements. Les ventes de voitures sont en chute libre (2020 : 2 millions, 2023 1,3 million). Les licenciements ne concernent pas uniquement les voitures à moteur à combustion, mais aussi les voitures électriques, et il s’agit souvent de délocalisations à l’étranger.
« M.A. France » : réformisme ou lutte de classe internationale.
Une table ronde s’est tenue récemment dans l’entreprise occupée, sous-traitant et appartenant au groupe Stellantis.
Nous étions présents à cette table ronde qui a eu lieu dans le cadre de l’occupation depuis 6 mois de l’entreprise M.A.France, qui a fermé en avril pour délocaliser en Turquie. Leur grève au printemps avait entraîné l’arrêt de 3 usines d’équipements en France et en Angleterre. En occupant les anciens salariés veulent empêcher l’évacuation des machines, des stocks et la destruction de l’usine. Ils s’opposent à la fermeture ou exigent des emplois de remplacement, des indemnités de licenciement plus élevées. Ils veulent être traités avec dignité au lieu d’être remerciés avec 15 000 euros après 20 ou 30 ans de travail. Il s’agit de 350 emplois, y compris les intérimaires. La fermeture de l’usine a provoqué des drames allant jusqu’à des tentatives de suicide.
Environ 50 à 60 collègues participent activement à l’occupation à tour de rôle. L’usine a été transformée en lieu de vie avec salle à manger, lits, etc. Les travailleurs sont présents dans l’usine 24 heures sur 24, tous les jours de la semaine. Jusqu’à présent, la caisse de grève a rapporté environ 30 000 euros. L’argent n’est pas versé, mais utilisé pour l’occupation commune (repas, frais de transport, tracts…) Le syndicat CGT de l’entreprise, l’administration locale et départementale organisent et soutiennent la lutte, nous n’avons pas vu d’autres syndicats.
Table ronde : environ 60 personnes au total. Étaient présents la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, des militants CGT locaux et départementaux. Un représentant du PCF (parti devenu social-démocrate) et une représentante de LFI (La France Insoumise de JL Mélenchon).
Dans le public, quelques occupants de l’usine (relativement peu nombreux, d’autres sont en formation d’État), des journalistes, des élus municipaux, des soutiens de gauche.
Il est à noter que TOUS les intervenants à la tribune (syndicats et partis) ont certes applaudi l’occupation, mais se sont orientés vers des solutions parlementaires ! Les collègues en lutte étaient bien sûr reconnaissants de la présence et du soutien des représentants des partis et des députés, mais leurs propositions n’ont pas suscité d’enthousiasme.
Les intervenants ont affirmé que de « nouvelles lois étaient nécessaires, qu’il fallait par exemple rendre des comptes sur les subventions à l’industrie automobile, que le gouvernement était lâche et acceptait tout, qu’il n’avait pas de stratégie économique… ». Et de défendre « la souveraineté économique de la France dans la production automobile »… etc. Et d’autres bal-bla parlementaires.
Quel espoir faut-il placer dans ces solutions réformistes à la crise ? La représentante de la LFI a expliqué naïvement et plutôt involontairement, comment toutes ses tentatives de faire passer des initiatives en faveur de l’emploi au Parlement ont échoué ces dernières années.
Elle a également calculé que la production automobile en France n’était pas si faible que cela par rapport à la concurrence internationale. Devrions-nous donc entrer en concurrence avec nos collègues à l’étranger ? Plusieurs intervenants, dont S. Binet ont également plaidé pour la « souveraineté » dans la production ! Faudrait-il s’associer avec « nos capitalistes » contre le reste du monde et surtout contre nos camarades de classe ??
Nous avons développé des points de vue internationalistes :
En tant que militants de la coordination automobile (CITA), nous avons parlé de la lutte des ouvriers d’Opel à Bochum en Allemagne et de la manière dont ils ont gagné la bataille : en organisant la solidarité et l’internationalisme de tous les travailleurs, en Allemagne ou ailleurs lors d’une grève illimitée et tenace. Voilà la ligne à suivre : la crise automobile internationale a besoin d’une réponse internationale avec des attaques dures en Allemagne et ailleurs. Nous avons annoncé la venue d’une délégation allemande au salon de l’auto et proposé d’en faire un événement international. (Applaudissements)
Un autre camarade a insisté sur le fait qu’il ne fallait rien espérer des politiciens bourgeois, que nous avions affaire à un système ; que les travailleurs et les capitalistes avaient des intérêts opposés. Nous avons besoin d’une autre société, du socialisme. Il a lui aussi été applaudi et un collègue a ensuite clairement parlé de la complicité des politiciens bourgeois.
Nous avons appris que des délégations viendraient d’Italie, du Portugal, de Belgique (Audi), de Belgique (Audi) et d’Allemagne pour le salon de l’automobile de Paris (jeudi 17 octobre). Rendez-vous à 11 heures Porte de Versailles/ Paris. Ce sera chaud !
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Des expériences répétées et toujours les mêmes discours syndicaux réformistes qui mèneront à l’échec et au désespoir, en voici quelques exemples :
WALOR (ARDENNES) : 212 EMPLOIS MENACÉS CHEZ L’ÉQUIPEMENTIER AUTOMOBILE !
Sans grand espoir malgré l’existence d’un candidat à la reprise, les salariés de la forge s’attendent à subir des licenciements.
« Avoir donné tout ce que l’on a donné dans cette boutique pour finir comme ça ! », disent certains.
Moins d’un an après le rachat du fabricant de pièces automobiles par le fonds d’investissement allemand Mutares, certains demandent l’ouverture d’un plan de sauvegarde pour le site de Bogny-sur-Meuse (Ardennes) qui compte 122 salariés, et le placement en redressement judiciaire pour l’unité de Vouziers (Ardennes) et ses 90 employés. ….
Quand en novembre 2023, le fonds d’investissement allemand Mutares rachète Walor, les salariés ne s’attendent déjà plus à un rebond. « Mutares, leur intention, c’est de conforter deux usines allemandes positionnées sur le même marché et rachetées récemment à un groupe portugais » dira un syndicaliste. Voyant la santé de la société se dégrader, les salariés se sont mis en grève cet été.
L’entreprise a bien perçu des fonds de l’État pour accompagner la conversion vers le marché du véhicule électrique mais les travailleurs n’ont pas vu les formations venir.
Lundi 23 septembre 2024, le cabinet du nouveau ministre de l’Économie Antoine Armand leurs ont répondu : « On va regarder »… On connaît la musique !
Dans l’attente des prochains rendez-vous devant le tribunal de commerce, salariés et représentants syndicaux se montrent peu optimistes. « On va essayer de garder le plus d’emplois possible… Le sort est scellé, mais il faut que ça serve pour les autres », disent des salariés.
Selon nous c’est toujours la même logique, celle du profit avant tout, qui oriente les restructurations industrielles et les investissements, pas l’intérêt du travailleurs.
« Chercher repreneurs » ou lutter tous ensemble ?
VALEO : « ON PENSE QU’IL Y A D’AUTRES SITES QUI VONT FERMER » !
Les salarié-es de Valeo ont manifesté à Paris contre la fermeture de trois usines de la Sarthe, de l’Isère et des Yvelines devant le siège de l’équipementier automobile et la suppression de plusieurs centaines de postes. Devant le siège social de Valeo à Paris, ce sont des centaines de salarié-es sont venus des 30 sites Valeo de France qui sont venus : « On sait que la fermeture des trois sites, ce n’est qu’un début, on pense qu’il y a d’autres sites à terme qui vont fermer ou qui vont voir leur effectif diminuer ».
Valeo, a annoncé, le 15 juillet dernier, chercher des repreneurs pour ces sites.
La CGT et Solidaires appellaient à une journée de grève interprofessionnelle le 1er octobre, mais aussi à des actions ciblées lors du Mondial de l’auto, mi-octobre à Paris.
Une crise du capitalisme ou de « mauvais patrons » ?
NOVARES VA FERMER SON USINE EN ALSACE !
La fermeture entraînera la perte de 122 emplois. Les représentants de l’intersyndicale CGT-FO-CFTC ont appelé à une manifestation mardi pour exiger le maintien du site.
Si la décision intervient dans un contexte de crise du marché automobile, les syndicats estiment que «Nous sommes mis à l’écart depuis 2018 pour décrocher de nouveaux marchés», a ainsi assuré une militante syndicale. Cette situation entraîne «l’arrivée progressive en fin de vie des contrats», a-t-elle poursuivi. Le «dernier espoir», selon l’intersyndicale, résidait dans de possibles commandes du constructeur britannique Ineos, mais celles-ci n’ont pas été obtenues.
Novares compte 37 usines réparties dans 22 pays pour un chiffre d’affaires d’1,2 milliard d’euros en 2023.
L’usine, qui fournit principalement Stellantis, emploie 122 salariés, «dont la moyenne d’âge dépasse 50 ans». Le site d’Ostwald est «encore une fois victime de toutes ces pratiques irrespectueuses de nos dirigeants vis-à-vis de leurs salarié-es, de ces politiques de délocalisation et de profits alors que nous avons les moyens techniques et les compétences humaines pour des productions de qualité», avait écrit l’intersyndicale dans un communiqué le 17 septembre.
Des résistances dispersées
A SAINT-QUENTIN-FALLAVIER (ISÈRE) : GRÈVE RECONDUCTIBLE STRATÉGIQUE CHEZ VALEO !
Sur le site Valéo de Saint-Quentin-Fallavier, des salarié-es se livrent, depuis lundi 30 septembre, à une grève reconductible des plus stratégiques. « Tous les techniciens d’une même ligne de production sont à l’arrêt. Or c’est une ligne qui fonctionne à flux tendu d’habitude. L’objectif, c’est de faire perdre beaucoup d’argent à la boîte pour qu’elle accepte de négocier. Nous avons une caisse de grève, nous pouvons tenir », explique Serge Gonnellaz, délégué syndical Sud Industrie. Objectif des grévistes : obtenir que leur site ne soit pas vendu.
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Lutte entre 2 lignes syndicales comme l‘exprime si bien et avec beaucoup d’ironie ces camarades de la CGT (en voici quelques longs extraits) :
« LETTRE DE LA CGT ÉNERGIE PARIS À SOPHIE BINET ET AU BUREAU
CONFÉDÉRAL !
Chère Sophie, cher(e)s camarades,
Le syndicat CGT Energie Paris tient à vous interpeller en ta qualité de première responsable de la CGT, ainsi que tous les camarades membres du bureau confédéral.
Voilà maintenant un an et demi que la nouvelle équipe dirigeante confédérale issue du dernier congrès exerce ses mandats.
Depuis, la situation dans notre pays ainsi que sur la scène internationale s’est considérablement dégradée, et nous avons traversé des épisodes politiques d’une extrême gravité.
…..
Dans la dernière période en France, nous avons assisté à un véritable coup d’état institutionnel, puisque nous nous retrouvons aujourd’hui avec un gouvernement illégitime, dont le premier ministre est issu d’une formation politique arrivée en cinquième position des élections législatives, et qui va mettre en place, une politique exclusivement au service du capital et de la bourgeoisie.
C’est d’ailleurs cette politique qui a été rejetée par les urnes et dont le peuple ne veut plus. Tout cela dans une phase de radicalisation extrême du capital qui, traversant une crise aigüe, fait naturellement le choix du fascisme et de l’extrême droite, contre nos intérêts de classe et l’intérêt du pays.
C’est dans ce contexte, qu’une répression inouïe partout sur le territoire et en outre-mer, s’abat sur notre classe sociale et donc aussi sur la CGT et ses militant(e)s.
Face à cette situation dangereuse et exceptionnelle, nous sommes convaincus que la CGT a un rôle central à jouer, qui nécessite la mise en place d’une stratégie nouvelle de combat à la hauteur des enjeux.
Or, au niveau confédéral de notre organisation, nous faisons le constat de la continuité de la stratégie perdante mise en place ces dernières années, stratégie qui a d’ailleurs été rejetée et c’est historique, lors du dernier congrès confédéral, au travers du vote sur le bilan d’activité.
Résultat, alors que Macron a piétiné notre vote et incinère le peu de démocratie existante dans la cinquième république, la CGT a rencontré le 25 septembre dernier, ce premier ministre fantoche en lui « demandant » d’appliquer nos revendications.
A part légitimer ce gouvernement, quel est le but de cette démarche les camarades ?
D’autant que, parallèlement, on organise une seule journée de mobilisation le 1er octobre, sans aucune autre perspective ni aucune stratégie à moyen terme.
Nous nous trouvons de fait dans la traditionnelle date de manifestation d’automne, comme lors des années précédentes, avec le succès que l’on connaît.
Aller convaincre les collègues de la nécessité de lutter dans ce cadre relève de l’exploit. D’ailleurs, dans la foulée, Barnier annonce une mesure qui va geler le niveau des pensions. A ce titre, quel bilan tirons-nous de la bataille pour nos retraites en 2023 ?
Une lutte s’étalant sur 5 mois, où du début à la fin, nous gardons le même rythme de manifestations saute-mouton, qui bien qu’elles soient massives, nous mènent à la défaite.
Chère Sophie et camarades du bureau confédéral, Macron en bon valet du patronat, n’obéira que par la contrainte, ce qui passe nécessairement par un rapport de force d’un autre niveau, avec comme stratégie identifiée, le blocage de l’outil de production dans le pays dans tous les secteurs, dans le cadre d’une grève générale et durable.
Nous tenons à préciser que nous n’attendons pas tout de la confédération et, nous sommes parfaitement conscients qu’une grève générale ne se décrète pas d’un claquement de doigts. En revanche, cela se construit et s’organise dans le temps, en s’appuyant sur des objectifs revendicatifs clairs et une stratégie ambitieuse et partagée.
Or, si la CGT ne porte pas cette ambition, personne ne le fera à notre place.
L’augmentation générale des salaires et des pensions, le retour à la retraite à 60 ans avec 37,5 annuités de cotisations, la mise en place de l’échelle mobile des salaires ne s’obtiendront jamais avec la seule manifestation du 1er octobre.
C’est la forme même de nos luttes qui doit être repensée et travaillée.
C’est pourquoi, dans le respect des aspirations portées lors du dernier congrès confédéral, nous demandons que notre CGT s’attelle avec toutes ses fédérations, UD et UL, à un véritable plan de bataille social, clair, ambitieux et partagé, afin que la CGT dans toutes ses composantes, se dresse et avance d’un seul bloc vers une grande victoire et l’obtention de nouveaux conquis sociaux.
Au vu de la situation en France et dans le monde, au vu de la violence que le capital nous impose et fait subir à la classe ouvrière, les électriciens et gaziers parisiens du service public, comme beaucoup de travailleuses et travailleurs en France, s’engageront nécessairement dans la grève et dans la lutte dans les prochains mois pour une seule et bonne raison : nous n’avons pas d’autre choix !
Et comme nous portons dans nos statuts de la transformation de la société, la confédération doit réaffirmer dans le cadre de nos luttes, la nécessité de la fin du système capitaliste, qui porte en lui comme seules perspectives, les guerres impérialistes, le fascisme, le désastre écologique et la ruine sociale pour les peuples du monde.
Nous sommes convaincus que si nous construisons collectivement ces objectifs en nous appuyant sur cet outil indispensable que représente la CGT, alors oui une victoire historique est possible, victoire qui ouvrirait nécessairement des perspectives bien plus grandes pour la classe ouvrière.
Chère Sophie, cher(e)s camarades du bureau confédéral, recevez nos salutations fraternelles. »