22 octobre 2025

L’iPhone, miroir du capitalisme en crise : de la marchandise star à la baisse tendancielle du taux de profit

L’iPhone, miroir du capitalisme en crise : de la marchandise star à la baisse tendancielle du taux de profit

Un produit symbole du XXIᵉ siècle. S’il existe un objet qui incarne notre époque, c’est bien l’iPhone. Objet de désir, symbole de modernité, concentré de technologie… il résume tout le triomphe apparent du capitalisme contemporain : innovation, mondialisation, individualisme, consommation.

Mais sous le verre poli et la coque de titane se cache une vérité plus profonde : celle des contradictions explosives du système capitaliste, que Marx avait déjà analysées il y a plus de 150 ans.
Car l’iPhone n’est pas seulement un produit de haute technologie : c’est un exemple de la baisse tendancielle du taux de profit — ce processus interne par lequel le capitalisme sape sa propre base.

 La loi révélée par Marx à l’œuvre : la baisse tendancielle du taux de profit

Le capitaliste n’est pas libre : la concurrence l’oblige à investir sans cesse dans des machines toujours plus performantes, dans des usines plus automatisées, dans la robotisation et les algorithmes — bref, dans ce que Marx appelle le capital constant (ou capital fixe).
Mais cette course à l’innovation, au lieu d’augmenter indéfiniment la rentabilité, fait baisser le taux de profit à l’échelle du système.

Plus de machines = plus de capital constant → moins de travail vivant → moins de plus-value car le travail vivant est la seule source de plus-value.

À l’échelle mondiale, selon les données compilées par Michael Roberts et Anwar Shaikh, le taux moyen de profit industriel mondial a chuté de plus de 30 % entre les années 1970 et aujourd’hui.
C’est cela que Marx appelait la loi de la baisse tendancielle du taux de profit :

“La même cause qui engendre le développement de la force productive du travail fait baisser le taux du profit.” (Le Capital, livre III)

En clair : chaque progrès technique réduit la part de travail vivant. Donc, pour compenser, les capitalistes doivent exploiter davantage les travailleurs, étendre la production ou spéculer sur la valeur fictive (finance, brevets, marketing, dettes).

Le capitalisme devient ainsi une machine folle, où l’innovation n’est plus un moyen d’émancipation, mais une fuite en avant pour retarder la crise.

L’exemple d’Apple. Voici comment évolue la valeur d’un produit phare du capitalisme contemporain, corrigée de l’inflation :

Modèle Année Coût de production (US$ constants 2025) Prix de vente (US$) Rapport prix / coût
iPhone (1er) 2007 324 599 1,85×
iPhone 4 2010 275 599 2,18×
iPhone X 2017 490 999 2,04×
iPhone 15 Pro Max 2023 470 1 199 2,55×
iPhone 16 Pro Max 2025 485 1 199 2,47×

Que révèle ce tableau ?

D’abord, que la productivité a atteint ses limites : malgré la modernisation et la délocalisation, les coûts réels ne diminuent plus.
Ensuite, que le capital ne parvient à maintenir ses profits qu’en augmentant artificiellement le prix de vente, grâce à son monopole, à la spéculation et à la manipulation du désir marchand – ce que nous avons tous vécu ces derniers temps : la spéculation rapace. Mais cette “solution” n’est que temporaire.

Cette crise de rentabilité du capital global qui nourrit la crise politique actuelle :

Les États, soumis au capital financier, écrasent salaires, prolongent le temps de travail hebdomadaire ou de vie

Pillent les Etats (notre argent), les capitalistes se servent par des subventions, des allégements d’impôts, etc., cassent les services publics dans une énorme répartition des biens de la société.

Les monopoles (comme Apple) captent des marges énormes tandis que les PME et les salariés s’étouffent ; et que la « paix sociale » se décompose.

La classe dirigeante bourgeoise, pour maintenir son ordre face aux résistances, renforce la répression et le contrôle idéologique.

En un mot : le capitalisme ne peut plus se développer sans détruire les bases sociales qui le font vivre.
Et c’est là que la lutte des classes reprend toute son actualité.

La contradiction du capital : produire toujours plus, valoriser toujours moins

L’iPhone, chef-d’œuvre technique, est un condensé de capital constant.
Chaque génération mobilise des semi-conducteurs plus miniaturisés, des matériaux plus coûteux, des chaînes d’assemblage robotisées.
Mais le travail humain vivant y est de plus en plus marginalisé, rationalisé, pressuré.

Les usines de Foxconn en Chine symbolisent cette course folle : des milliers d’ouvriers payés au rabais, travaillant douze heures par jour pour assembler des produits vendus dix fois leur coût ; des suicides collectifs, des révoltes étouffées, des syndicats brisés.

Là se joue le « drame » de la valeur : plus la machine perfectionne la production, plus la part du travail vivant diminue et donc diminue également de potentielles plus-values.
Le capital se heurte à sa propre limite : il détruit la source (le travail vivant) de sa propre valorisation.

 Des profits qui se déplacent vers la finance et le marketing

Pour compenser cette baisse tendancielle, Apple — comme tout grand monopole — multiplie les artifices :

*délocalisations (vers des pays à « bas coût ») pour réduire la masse salariale ;

*intégration verticale pour contrôler la chaîne de valeur ;

*financiarisation pour gonfler artificiellement les profits via rachats d’actions et spéculation boursière ;

*mise en scène du luxe pour maintenir des marges sur la base du fétichisme de la marchandise.

Mais cette fuite en avant n’annule pas la contradiction, elle la déplace.
La valeur se concentre entre quelques monopoles mondiaux, tandis que les maillons inférieurs — sous-traitants, fournisseurs, États dépendants — s’effondrent.
La suraccumulation de capital dans la tech et la spéculation généralisée annoncent la prochaine crise systémique.

 Du smartphone à la crise politique

Ce mécanisme économique se traduit aujourd’hui dans la crise politique ouverte ou comment augmenter le taux de profits tout en maintenant l’ordre actuel.
En France, le gouvernement ‘Lecornu II’ n’est qu’une tentative de plus de la bourgeoisie pour stabiliser un ordre social en décomposition.
Face à la stagnation économique, à la désindustrialisation, à la colère populaire, la classe dominante resserre son appareil d’État, réprime, moralise et privatise.

Mais rien n’y fait : les contradictions du capitalisme mûr se répercutent sur le plan politique :

*division du bloc bourgeois, instabilité ministérielle ;

* valorisation des fascistes comme alternative ;

*désaffection des masses pour les « institutions républicaines » ;

*crise de légitimité du régime qui ne représente plus le « peuple ».

L’État apparaît ouvertement comme exécutant de la dictature des monopoles, il est devenu gestionnaire des crises du capital financier.
La “crise politique” n’est donc pas une crise de gouvernance de tel ou tel dirigeant, mais une crise de reproduction du capital lui-même.

 Le rôle des révolutionnaires

Face à cela, les révolutionnaires ne doivent pas se contenter de dénoncer, mais d’expliquer. Chaque iPhone, chaque réforme, chaque remaniement ministériel est un symptôme des contradictions du système.
C’est en révélant ces contradictions aux masses — entre travail et capital, entre apparence et essence, entre progrès potentiel et exploitation réelle — que nous préparons la conscience révolutionnaire.

Le marxisme ne rejette pas la technologie : il révèle pour qui et contre qui elle est mise en œuvre. Il interroge sur quel progrès pour quels besoins ?
Sous le socialisme, les forces productives (redéfinie en fonction des besoins sociaux réels) ne serviront plus la valorisation du capital, mais la libération du travail humain.

 Conclusion : le fétiche se fissure        

L’iPhone fut l’idole du capitalisme triomphant. Aujourd’hui, il en devient le miroir : brillant à la surface, mais fissuré à l’intérieur.
À mesure que le taux de profit baisse, que les crises s’approfondissent et que l’État bourgeois se délégitime, le moment viendra où la technologie elle-même — arrachée à la logique du profit — servira enfin la collectivité humaine. Où les objets produits – l’iPhone ou autres – le seront sur décision des travailleurs et selon les besoins de la société.

C’est ce monde-là que nous devons préparer.

 

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