En quelques jours, deux événements apparemment sans rapport ont révélé le même mouvement de fond : la fascisation ouverte de l’État bourgeois, quel que soit le gouvernement, quel que soit son vernis « progressiste ». À Sainte-Soline, des gendarmes se filment en train de tirer pour blesser, et d’insulter, de jubiler, d’ignorer les blessés comme on piétine des insectes. À Verdun, c’est une messe pour Pétain, organisée quasi clandestinement, mais protégée par l’appareil d’État, où se pavanent révisionnistes, antisémites et notables d’extrême droite.
Deux scènes qui pourraient sembler éloignées. Elles racontent pourtant une seule et même histoire : celle d’un capitalisme incapable de masquer sa violence, obligé d’avancer masqué par ses chiens de garde, et désormais prêt à réhabiliter ses pires fantômes pour maintenir son Ordre.
Sainte-Soline : la preuve filmée que la répression n’est plus un « dérapage », mais un système
Les 84 heures d’images obtenues par Mediapart dévoilent le vrai visage de l’appareil répressif en France. Pas un visage « débordé ». Pas un visage « sous pression ». Mais celui de gendarmes froids, disciplinés, obéissant aux ordres illégaux d’une hiérarchie sûre de son impunité, se vantant de viser « en pleine tête » ou « dans les couilles », parlant de « tuer », riant, chantant du Dalida entre deux grenades explosives.
Le capital n’a plus besoin de se cacher : ses soldats filment leurs propres crimes.
Tirs tendus interdits ?
Ordres illégaux répétés par la moitié des escadrons ?
Blessés graves abandonnés dans un nuage de gaz ?
Images ignorées par l’IGN, aucune poursuite lancée, aucun gendarme interrogé ?
La réalité saute au visage : l’État bourgeois protège ses hommes parce qu’ils accomplissent exactement ce qu’on leur demande. Maintenir par la force l’expropriation de l’eau, des terres, de la vie. Protéger, comme le disent eux-mêmes certains gendarmes, « un putain de trou qui appartient même pas à l’État », c’est-à-dire un investissement capitaliste privé.
Voilà le cœur du problème :
lorsque le capitalisme arrive en fin de cycle, lorsque les marges de profit se réduisent, il ne reste plus qu’une ressource : la violence d’État pour maintenir l’ordre capitaliste.
Et cette violence est de plus en plus assumée, normalisée, glorifiée.
Verdun : la bourgeoisie teste la réhabilitation du fascisme
À Verdun, ce n’est pas seulement une poignée de nostalgiques qui se réunissent pour « honorer un mort ». C’est le système entier qui laisse faire, qui protège même :
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un préfet présent mais « impuissant »,
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une église acceptant d’héberger une messe pour un collaborateur condamné,
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des militants d’extrême droite chantant « Maréchal nous voilà » dans la rue,
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un président d’association expliquant tranquillement que Pétain fut « le premier résistant de France ».
Voilà le test grandeur nature : combien de révision de l’histoire l’opinion publique est-elle prête à accepter ?
Combien de pas vers l’extrême droite un État « centriste » peut-il tolérer sans que le vernis craque ?
Le fascisme ne revient jamais du jour au lendemain.
Il revient en réhabilitant ses symboles, en en créant de nouveaux.
Il revient dans les églises, dans les cérémonies, dans les discours « historiques ».
Il revient quand on présente un chef nazi comme un « homme courageux qui a protégé les Français ».
Il revient quand le pouvoir laisse cet espace prospérer.
Macron, soc-dem ou manager du capital ? Le résultat est le même : la fascisation
Certains persistent à penser que tout cela arrive « sous Macron », que la présence d’un président « libéral », « progressiste », empêcherait la dérive autoritaire. C’est l’inverse : c’est précisément parce que Macron est un gestionnaire zélé du capital, et non un fasciste déclaré, que le fascisme avance si vite. Car le fascisme n’est pas un style politique, mais une fonction historique : sauver le capitalisme quand il vacille.
Il avance quand :
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les taux de profits chutent
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les catastrophes écologiques éclatent au grand jour,
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les colères populaires montent,
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le parlementarisme n’arrive plus à contenir les contradictions.
Alors les fractions les plus réactionnaires du capital monopoliste s’imposent de plus en plus pour remplacer la tromperie de la démocratie bourgeoise par la dictature ouverte : violence policière, légitimée par la propagande, renforcée par le révisionnisme, couverte par la justice.
Les gendarmes de Sainte-Soline savent qu’ils n’ont rien à craindre, alors ils filment.
Les pétainistes de Verdun savent qu’ils peuvent tout dire, alors ils réécrivent l’histoire.
L’État sait qu’il doit durcir, alors il laisse monter ceux qui rêvent de recommencer.
Vers où allons-nous ? Vers ce que le capitalisme exige : un pouvoir toujours plus autoritaire
Pas besoin d’attendre Le Pen pour voir le fascisme.
Il avance déjà :
- dans les grenades qui explosent dans les têtes,
- dans les caméras-piétons transformées en trophées,
- dans les messes pour glorifier le chef d’un régime antisémite, rallié au nazisme
- dans l’impunité totale de ceux qui servent l’ordre bourgeois.
La bourgeoisie prépare le terrain. Elle mesure la résistance. Elle teste jusqu’où les masses accepteront la violence et jusqu’où elles toléreront la réhabilitation du fascisme.
Conclusion : organiser la résistance populaire
Face à ce virage, une seule voie : l’organisation autonome des masses, la reconstruction d’un mouvement révolutionnaire, la politisation des luttes écologistes, féministes, antiracistes, ouvrières.
La fascisation n’est pas une fatalité. C’est une tentative désespérée d’un système qui s’effondre : Être obligé d’appliquer la violence est un signe de faiblesse du capitalisme en crise ; la preuve qu’il ne peut résoudre autrement ses crises que par la marche au fascisme et à la guerre.
Mais si les masses ne s’organisent pas, alors oui : le capital ira jusqu’au bout, jusqu’à des Sainte-Soline généralisées, jusqu’à Verdun réhabilitant Pétain, jusqu’au fascisme assumé.
Le moment n’est plus à l’indignation isolée. Il est à la lutte organisée. Mais il ne suffit plus de lutter seulement, mais de construire un large Front Uni impérialiste et antifasciste et surtout une alternative au capitalisme c’est-à-dire de s’organiser pour le véritable socialisme !!
C’est la seule réponse historique que les peuples ont toujours opposée à la barbarie capitaliste.
Bachir
