2015-2018 : l’extrême-droite de plus en plus armée
Depuis plusieurs années, les groupes d’extrême-droite se réorganisent. Par des organisations comme le Bastion Social d’abord, mais aussi de manière plus souterraine. Corrélé à une forte augmentation de la circulation des armes en France et à une fascisation de la police, on voit des groupes d’extrême-droite s’armer, et parfois passer à l’action. Recension des moments où les fachos se sont retrouvés avec des armes entre les pognes.
Janvier 2015 : Hermant, chef des identitaires lillois et indic des flics fournit des armes à Amedy Coulibaly.
L’affaire avait fait grand bruit, y compris dans la presse mainstream. Claude Hermant, cadre de l’extrême-droite lilloise a fourni des armes, en provenance de Slovaquie, à l’islamiste fanatique Amedy Coulibaly. On sait ce qu’il adviendra de ces armes, qui seront utilisées pour la prise d’otages de l’Hypercasher.
Mais ce massacre antisémite n’a pas dû beaucoup émouvoir Hermant, lui-même connu pour son antisémitisme forcené. Historiquement proche d’une autre balance du milieu facho, Serge Ayoub, Claude Hermant s’était rapproché du groupuscule Génération identitaire pour en devenir l’un des cadres. Entre temps, il avait participé au service d’ordre du FN, le DPS. Localement, il s’était implanté à travers la Maison Flamande qui servait de base à l’extrême-droite et aux ratonnades dans le vieux Lille, mais aussi aux tueurs de la Deûle (5 personnes retrouvées mortes dans le canal entre 2010 et 2011).
Comment s’est-il procuré ces armes ? Sûrement grâce à ses anciens contacts. Hermant fut en effet toujours en lien étroit avec les forces de police. Ami de la police lilloise, il a fait des piges comme mercenaire en Afrique pour la DGSE. Volontaire auprès des légions croates pendant les guerres des Balkans dans les années 90, il y apprendra les ficelles du trafic d’armes. Il sera condamné en novembre 2017 à 7 ans de prison.
2014-2018 : La guerre au Donbass, le retour du mercenariat fasciste.
Le retour des conflits armés en Europe a dopé l’extrême-droite. Suite à la révolte de février 2014 sur la place Maïdan à Kiev et avec l’influence des Nationalistes en Ukraine, l’extrême-droite européenne s’est déchirée : pro-russe ou pro-Ukraine.
Quoi qu’il en soit, de très nombreux militants français ont été faire leurs armes (au sens propre) sur le front ukrainien. Une enquête fouillée du magazine StreetPress montre un nombre impressionnant de militants de premier ordre armés.
Cet aspect du conflit est ressorti avant l’Euro 2016 en France où un français s’est fait choper à la frontière polonaise matossé comme un porte-avion : des Kalashnikovs, un lance-roquette, des roquettes, 125 kilos d’explosif.
Manque de chance pour lui : les armes achetées étaient inopérantes (sans dispositifs de mise à feu) : ce qui est plutôt embêtant si on souhaite s’en servir.
Selon la police ukrainienne, il souhaitait attaquer la France pendant l’Euro 2016 pour lutter contre « la politique migratoire de la France » et son rôle dans « l’islamisation et la mondialisation ». Il a été condamné à 6 ans de prison en Ukraine.
Avril 2016 : Les flics découvrent un arsenal chez des nazis à Marseille.
En plein mouvement contre la loi Travail, l’info était passée à la trappe. Mais c’est pourtant une bonne cargaison d’armes qui a été interceptée par les flics dans les Bouches-du-Rhône.
Lors des perquisitions, « onze armes d’épaule, 2 revolvers gomme-cogne, 28 armes blanches, des gilets pare-balles, des casques lourds, plusieurs drapeaux et objets nazis ont notamment été découverts ».
11 néo-nazis ont été arrêtés. Parmi eux, leur chef, bien connu pour son long passé de cogneur chez les fachos. Le jugement n’a pas encore été prononcé.
Octobre 2016 : Encouragés par l’extrême droite, des centaines de policiers défilent de nuit et armé sur les Champ-Élysées.
D’autres rassemblements du même type ont lieu dans différentes villes. Cette proximité idéologique entre la police et l’extrême droite s’est traduit par un fort vote des policiers et gendarmes pour le FN lors du premier tour des présidentielles comme le montrait cet article de Paris-luttes.info.
Juin 2017 : Encore un groupe armé démantelé dans les Bouches-du-Rhône.
En octobre 2017, cette fois, on en entend un peu plus parler dans la presse. Mais l’affaire commence en juin quand Logan N., fervent admirateur d’Anders Breivik et « radicalisé sur internet » se fait toper par la police principalement pour ses dires sur le web (et son fusil à pompe dans sa chambre). Le Monde sortira un article extrêmement complaisant sur le parcours politique misérable de Logan. Ce militant issu de l’Action française s’était fait remarquer les mois précédents par une série d’attaques sur des militants de gauche avec ses copains. Mais il est présenté comme un « loup solitaire ». Problème, 4 mois plus tard les flics lancent un gros coup de filet contre l’entourage de Logan. Le loup solitaire avait une meute.
Pour ce qui est des cibles, bien que multiples, elles étaient principalement choisies chez les migrants… Mais surtout, on a encore pu voir qu’il y avait des armes en circulation dans les mouvement d’extrême-droite. Enfin, l’enquête a prouvé que le groupe était « bien plus structuré qu’à première vue ». Sans blague ?
Novembre 2017 : Interpellations de militants d’extrême-droite au pays basque dans le cadre d’un « trafic d’armes ».
Encore une information très confidentielle (on n’ose imaginer ce qui se serait passé si des gauchistes s’étaient faits choper avec de telles armes) : 5 personnes se sont fait embarquer par la PJ pour trafic d’armes. Ces armes auraient été achetées sur Internet. On n’en sait guère plus, à part qu’ils ont été mis sous contrôle judiciaire.
Novembre 2017 : Thierry Maillard, figure de l’extrême droite Rémoise se fait coincer pour un port d’armes prohibé.
Il faut dire que le gaillard n’en est pas à son coup d’essai. Déjà condamné par la justice en 2016 pour trafic d’armes puis libéré. Et ce, malgré un stock et une organisation que l’on pourrait qualifier d’impressionnants :
Les écoutes téléphoniques avaient notamment révélé l’usage d’un langage codé pour opérer les transactions avec les différents clients.
Le stock, constitué de 35 armes parmi lesquelles kalachnikov, fusils, revolver, pistolet, ainsi que 4 000 munitions, avait été saisi chez dans la boutique de M. Maillard ainsi que chez ses deux co-prévenus.
Il était néanmoins mis à l’épreuve. Il rechute moins de deux ans après où il se fait toper bourré au volant avec deux pistolets, 3 couteaux à cran d’arrêt, 10 chargeurs et une centaines de balles de 9 mm. « C’était pour aller à la chasse monsieur l’agent ! ». Retour à la case prison.
Avril 2018 : Une note de la DGSI fait la lumière sur les liens entre police/armée et groupuscules d’extrême droite.
Une note des services intérieurs de renseignements était révélée par le journal Mediapart qui titrait « Forces de l’ordre liées à l’ultra-droite violente : la DGSI s’inquiète.
31 mai 2018 : Des tirs contre un homme sortant d’une mosquée à Pont-Saint-Esprit, dans le Gard.
Ces tirs (à blanc) non revendiqués, ont été classés par le parquet comme un acte raciste. À noter que la mosquée de Pont-Saint-Esprit est connue comme étant représentative d’un islam modérée et d’un dialogue inter-religieux.
Juin 2018 : découverte par le grand public du groupe AFO (Action Force Opérationnelle).
Un groupe assez structuré, principalement en région parisienne est mis à jour par les flics. Cette fois, la sociologie du groupe est un peu différente. Il ne s’agit plus de jeunes isolés ou « marginalisés » mais de personnes salariées, intégrées dans des postes à responsabilités. Et quels postes ! Constitués principalement d’anciens militaires, de policiers, il y a également des fonctionnaires de l’Éducation Nationale.
Parmi les actions envisagées très sérieusement : l’assassinat d’imams supposément « radicalisés », l’empoisonnement de viande hallal dans les supermarchés, des attaques contre des femmes voilées… Le groupe était assez hiérarchisé. Le recrutemement s’effectuait sur internet.
Mais surtout, tous les acteurs arrêtés (une dizaine de personnes) étaient armés à des niveaux divers. Ça allait du type qui se baladait avec une grenade sur lui en permanence à d’autres qui avaient « juste » une licence dans un club de tir. Tous fréquentaient des clubs de tirs et étaient donc en possession d’armes légales. L’un d’eux, basé dans les Yvelines, semblait prêt à passer à l’acte, puisqu’il avait confectionné un parfait labo d’explosifs.
Ces fondus fervents de « l’autodéfense », c’est un pan de l’extrême-droite qui parle : la tendance parano du grand remplacement. Convaincu du choc des civilisations, AFO s’est constitué uniquement sur des bases islamophobes. Le groupe est en effet une variante des Volontaires pour la France, groupe proche des groupuscules « Résistance Républicaine » obsédé par le « péril islamique » et dirigé par Antoine Martinez, Général de l’armée de l’air.
Rien de très étonnant dans une France bassinée par la propagande de BFM TV. Rien d’étonnant non plus à voir 6 membres du groupe libérés après leur garde-à-vue. C’est le cas de leur chef, Guy Sibra pourtant assez gratiné. Chouchouté par les médias, il pourra même donner une interview hallucinante au Parisien pour minimiser les projets de l’AFO.
Ces différents exemples montrent que l’extrême-droite est en train de se ré-armer en France et en Europe. La collusion manifeste dans plusieurs affaires de l’extrême-droite avec les forces policières et militaires est devenu véritablement inquiétante. Plus que jamais il faut être vigilant, et organiser une riposte massive et populaire pour contrer les excités de la gâchette qui représentent une véritable menace pour toutes et tous.