3 décembre 2024

Jeux Olympiques : le grand Saccage 2024

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Jeux Olympiques : le grand Saccage 2024

Nous sommes entré-e-s en résistance face aux saccages écologiques et sociaux que provoquent les Jeux Olympiques de Paris en 2024. Nous, habitant-e-s de Seine-Saint-Denis et de ses alentours, associations et collectifs, sommes rassemblés pour défendre les espaces où l’on vit, où l’on habite, où l’on se rencontre, où l’on tisse des liens et ou l’on s’amuse, menacés par la préparation et la tenue de ces jeux.

Les chantiers des JO ont commencé malgré la crise sanitaire et les résistances locales, et les retards accumulés accélèrent leurs cadences et dégradent les conditions de travail.. Les conséquences sont nombreuses : quartiers irrespirables (accélération de la bétonisation et de la pollution), inabordables (spéculation immobilière, entraînant l’expulsion des pauvres et des modestes), policés (imposition des normes des investisseurs et du tourisme, surveillance et répression), implantation de grandes enseignes, réduction des espaces publics et des parcs, disparition d’espèces protégées, … et la liste est encore longue. Les différents saccages engendrés par les Jeux Olympiques ne font qu’accélérer les problèmes écologiques et les injustices sociales dans nos villes, et nous privent des moyens de décider collectivement de ce qui nous entoure.

Depuis octobre 2020, nous, collectifs, associations et habitant-e-s, mêlons nos voix et nos envies d’agir au sein de la coalition Saccage 2024, en composant avec les positionnements et les stratégies différentes des un-e-s et des autres, pour que ce désastreux héritage ne soit pas imposé sur les territoires concernés. Cette coalition vise à renforcer notre force d’action face aux transformations urbaines. Elle symbolise aussi que ces projets, aussi éparpillés qu’ils paraissent, s’inscrivent tous dans une vision que nous rejetons – celle de la transformation de nos espaces de vie en une métropole toujours plus mondialisée, inégale et ravageuse pour nos environnements.

C’est dans la résistance que d’autres futurs se construisent ! et nous souhaitons contribuer à ce qu’ils émergent, en partant des personnes les plus affectées par ces changements, en lien avec celles et ceux qui s’organisent déjà pour résister à la métropolisation et qui développent l’entraide, en solidarité avec toutes les luttes d’habitant-e-s contre les projets métropolitains mortifères.

JO 2024 : Paris obtient la médaille d’or du saccage dans le 93

En Seine-Saint-Denis, alors que les travaux pour les Jeux olympiques 2024 progressent, plusieurs collectifs militent contre l’invasion de leur territoire, les expulsions de squats, la destruction des lieux de biodiversité et la gentrification sécuritaire et raciste du 93.

L’atmosphère est pesante dans une période où d’un côté l’extrême droite gagne du terrain et de l’autre, la température moyenne terrestre grimpe sans arrêt. Cependant, nous nous préparons à la « Fascisation Olympique » qui se déroulera en 2024 à Paris.

Au nom de l’ordre olympique, les pouvoirs publics saccagent plusieurs poumons verts de Seine-Saint-Denis (93) pour mettre en œuvre le modèle d’une ville colonisée par une religion  : le sport. Nous disons religion car les Jeux olympiques modernes défendus par le Comité international olympique (CIO), depuis la mise en scène de l’esthétique nazie durant les jeux de Berlin de 1936 jusqu’à nos jours, ont toujours été pensés ainsi. Dans un discours radiodiffusé en 1935, Pierre de Coubertin (fondateur du CIO) affirmait que l’olympisme moderne était une religion et que l’athlète exalte sa patrie, sa race et son drapeau.

Après la Seconde guerre mondiale, la fameuse cérémonie du passage du flambeau a véhiculé les idéaux politiques et moraux du mythe de Prométhée. Pourtant, Hegel avait déjà montré qu’il n’y avait ni morale ni idéal chez Prométhée, qui n’a enseigné aux hommes que la ruse et la maîtrise de la nature. Bien avant la vision élitiste Coubertinienne du sport, dans La Cité Antique (1864), l’historien Fustel de Coulanges insistait sur l’importance du symbolisme du feu sacré dans les religions indo-européenne  [1].

Saccage 2024 : Des JO pas très écolos

Idéaux sportifs dévoyés

Aujourd’hui, ce symbole du feu sacré devient une arme de contrôle massif que nous sous-estimons  : le numérique. Par le déploiement massif de caméras de surveillance et l’utilisation prédictive des données urbaines pour modéliser les futurs JO, il permet d’en assurer un contrôle total.

Le greenwashing (olympique) continue, dans le 93 comme partout dans le monde, en prétendant que sa stratégie est libérale et écologique alors qu’elle est liberticide et écocide, renforcé par l’apparition de nouvelles stratégies de contrôle et de surveillance numérique  [2]. Alors qu’il faudrait favoriser les technologies simples et peu consommatrices, on impose aucune limite sérieuse à l’accumulation de nouvelles technologies : drones, reconnaissance faciale, vidéo-surveillance algorithmique, etc. L’omniprésence du spectacle olympique via les nouvelles technologies a pour but la domination des consciences des individus. Cette domination laissera le champ libre à la répression des migrants et des musulmans sur le territoire du 93, les premières victimes du greenwashing sécuritaire étant toujours les personnes racisées.

Ainsi, sur les chantiers olympiques, les entreprises ont recours au travail dissimulé de sans-papiers, forme d’esclavage moderne pouvant aller jusqu’à la mort. Récemment, un énième scandale a révélé l’exploitation de dizaines de sans-papiers par une multitude de sous-traitants aux relents mafieux  [3].

L’année de l’olympisme à l’école

Pour les scolaires, « l’année de l’olympisme, de l’école à l’université » est bien ancrée dans les esprits des jeunes. Le programme est changé afin de faire « découvrir » les disciplines modernes des JO. Les contenus pédagogiques dédiés comme les outils du Comité national olympique et sportif Français (CNOSF) et du CIO ont pour but une sportivisation radicale de la jeunesse dans le cadre d’un plan national de promotion des valeurs olympiques  [4].

L’idéologie olympique a déjà commencé à recruter des jeunes jusqu’à 2024. Une main d’œuvre qui va servir à promouvoir les nouveaux quartiers accélérant la gentrification par les Jeux. La rénovation de plusieurs équipements sportifs, la construction de nouveaux logements et de nouvelles lignes de transport constituent la majeure partie des chantiers qui saccagent le 93. Aucun doute sur le fait que le saccage, ainsi que les impacts potentiels sur notre environnement, puissent être grave. Le collectif saccage 2024 utilise ce terme car il s’agit bien d’une vaste opération de mutilation profonde du 93 populaire, permise par les JO en ignorant l’histoire et les valeurs de ce territoire. Les projets imposés se situent dans la logique d’avant la crise sanitaire, celle qui conduit à la privatisation de tout, à une catastrophe climatique et sociale irrémédiable  [5].

La plupart des syndicats se sont alignés sur le point de vue de l’idéologie olympique. Il est à regretter que seuls Solidaires et la CNT aient refusé de signer la charte olympique. Grâce aux collectifs du 93, nous avons eu plusieurs victoires à célébrer contre les JO. La première, c’est la lutte du collectif des Jardins d’Aubervilliers concernant la piscine d’entraînement. Plus récemment, la victoire des collectifs Notre Parc n’est pas à vendre (NPPNAV) et du Mouvement national de lutte pour l’environnement en Seine-Saint-Denis (MNE93) contre la construction d’un boulodrome prévue au Parc Georges-Valbon (seule réserve Natura 2000 d’IDF). Et enfin, la mobilisation massive en Espagne contre la candidature de la Catalogne aux Jeux d’hiver 2030. Ces victoires montrent que la lutte paye !

Mais la liste des luttes encore à mener est longue  : l’échangeur autoroutier du quartier Pleyel, le village olympique à l’Île-Saint-Denis, la ZAC Plaine Saulnier et le centre aquatique olympique, le campus hospitalo-universitaire Grand-Paris-Nord à Saint-Ouen, le Grand Paris express et ses gares  [6]. La Seine-Saint-Denis devient un territoire olympique mais les luttes continuent sans relâche malgré les expulsions massives des squats occupés par les plus précaires  : sans-papiers, artistes, étudiants et étudiantes…

Pour l’heure, la lutte est loin d’être gagnée. Les chances sont minces qu’une grève se produise en août 2024 pendant les Jeux. Mais rêvons d’une étincelle qui embrase le mouvement social  ! Mobilisons-nous massivement contre les JO écocides et leurs dérives racistes et sécuritaires. Et « ce ne sera que le début  ! » comme disent nos camarades kurdes.

Des dizaines d’activistes, de chercheurs et d’habitants du monde entier se sont réunis les 21 et 22 mai en Seine-Saint-Denis à l’appel du collectif Saccage 2024. Le but : organiser une lutte contre les Jeux olympiques à l’échelle internationale.

« No olympics anywhere » (« Des Jeux olympiques nulle part »). À l’entrée de l’université Paris 8, il est environ 10 heures, samedi 21 mai, lorsqu’une dizaine de militants se regroupent avant de déployer trois larges banderoles. « On veut pas de compétition, on veut la révolution », peut-on y lire. Sur l’une d’entre elles, un monstre en costume-cravate, une valise de billets en main, écrase du pied des barres d’immeubles.

Comment arrêter les dégâts écologiques et sociaux de l’un des évènements sportifs les plus populaires au monde ? Voilà l’énigme que tente de résoudre le collectif Saccage 2024, qui organisait un week-end de rencontres internationales anti-Jeux olympiques (JO). Le lieu choisi n’a rien du hasard : des projets de constructions massifs ont d’ores et déjà démarré dans le département qui abritera de nombreuses infrastructures sportives lors des JO de Paris en 2024. Associations et habitants des alentours se mobilisent depuis plusieurs années contre la disparition des Jardins ouvriers d’Aubervilliers, pour la préservation de l’Aire des Vents qui longe le parc départemental Georges Valbon à La Courneuve, et contre l’échangeur autoroutier Pleyel de Saint-Denis.

« Les gens qui ne vivent pas à Saint-Denis ne perçoivent pas encore l’ampleur des destructions, dit Natsuko Sasaki, une des organisatrices. Quand on parle des Jeux olympiques, on a le plus souvent en tête un événement magique, festif. Mais ce n’est pas du tout l’image qu’en ont les habitants de Seine-Saint-Denis, tous sont inquiets par la destruction des lieux et par la potentielle hausse des loyers que les Jeux engendreront. »

« Les poumons des enfants se souviendront à jamais des Jeux olympiques 2024 »

À l’appel de Saccage 2024, des activistes espagnols, américains, japonais et russes sont venus pour alerter sur les conséquences dévastatrices et durables de la compétition sportive. Pour eux, il s’agit également de réfléchir aux tactiques d’intensification de la lutte d’ici 2024 afin de contraindre les élus locaux à reculer. « Les Jeux olympiques s’inscrivent dans un monde capitaliste, une logique économique préexistante, mais dont les conséquences vont dramatiquement s’accélérer, lance Amy, membre du collectif, en préambule. Consolider nos liens, transmettre une mémoire des luttes anti-Jeux olympiques est aussi le but de cette rencontre. »

Ce « savoir-faire », Bernat Lavaquiol est venu le partager avec ses homologues français. Le militant catalan est la figure d’un mouvement qui s’oppose depuis un an à la candidature de sa région à l’organisation des Jeux d’hiver en 2030. « Pour l’instant, nous centrons notre discours auprès des habitants sur les conséquences économiques que l’événement pourrait entraîner dans ce contexte rural », a confié celui qui est parvenu récemment à mobiliser plus de 5 000 personnes lors de la première manifestation d’opposition.

Côté Français, Hamid Ouïdir peine, lui, à faire imposer sa voix. Membre de la Fédération des conseils de parents d’élèves du 93 (FCPE), ce père de deux enfants se mobilise avec force depuis 2018 contre la construction prochaine d’un échangeur autoroutier pour les Jeux olympiques 2024, et ne cesse d’alerter sur la pollution qui en découlera autour du groupe scolaire Pleyel Anatole France, à Saint-Denis. Après avoir tenté tous les recours possibles auprès du tribunal administratif, FCPE 93 et l’association Vivre à Pleyel ont porté la cause de ces 600 enfants devant la Cour européenne des droits de l’homme en décembre dernier. « Les élus locaux continuent de nous dire que ce projet n’est pas lié aux JO, a-t-il fustigé, des larmes roulant sur ses deux joues. Si l’échangeur voit le jour, nous serons confrontés à un scandale sanitaire sans précédent. Les poumons des enfants de Pleyel se souviendront à jamais des Jeux olympiques 2024. »

« Aucun jeu n’est durable »

Le chercheur américain Jules Boykoff, spécialiste du sport et de la politique et auteur de Power Games, a mis en lumière les mécaniques d’écoblanchiment à l’œuvre. « La plupart du temps, les enjeux écologiques sont mis en avant au moment des candidatures pour renforcer le soutien des populations locales, a-t-il souligné. Ils sont ensuite totalement ignorés une fois les projets pour les Jeux lancés. » En exemple, il a cité la création de la catégorie des « sustainability partners » (« partenaires durables ») lors des Jeux de Londres, en 2012. Parmi ces alliés « verts », on ne trouvait autre que le géant des hydrocarbures britanniques, British Petroleum (BP), le constructeur automobile BMW ou encore EDF. Pour Paris 2024, le géant chinois du commerce en ligne Alibaba a été choisi comme sponsor principal par le comité olympique.

Le géographe urbain et politique à l’université de Lausanne (Suisse), Sven Daniel Wolfe, a fait le même constat. D’après ses recherches, les intérêts écologiques et économiques entrent en totale contradiction. Pour chaque édition, dès lors qu’un jeu est prospère économiquement, il entraîne, inéluctablement, des conséquences graves sur l’environnement. « Aucun jeu n’est durable », a-t-il conclu. À Pyeongchang, une forêt de montagne sacrée vieille de 500 ans a été détruite pour installer des pistes de ski dans le cadre des JO d’hiver de 2018.

Dimanche, le 22 mai, une visite des sites olympiques dans le parc Georges Valbon (Courneuve) était organisée. Intitulée « Toxic Tour », elle a débuté par une visite à l’Air des Vents, où le village des médias est en cours de construction. Puis elle s’est poursuivie par un passage au Boulodrome, menacé de disparition pour accueillir le lieu de compétition des tirs. Le tout s’est terminé par d’enthousiasmants « Jeux contre-olympiques » inclusifs et non marchands, histoire de montrer qu’« un autre sport est possible ». Loin des partenariats des firmes pétrolières ou des géants de l’e-commerce.

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