A nouveau nous parlerons de la Commune de 1871. On en parle pour au moins 3 raisons: son exemple va inspirer toutes les révolutions prolétariennes qui vont suivre jusqu’à la Commune de Shanghai en 1968. Ensuite, la fin mai 1871 sera la fin sanglante de la Commune — nous publions à ce titre un de nos articles qui est paru dans notre brochure sur l’histoire de la Commune. Enfin, pour inviter nos lecteurs à participer, le Samedi juin dès 11 heures à la Place des fêtes à Paris, aux débats, aux chansons et à passer à notre table de presse. A 14heures, nous manifesterons, avec tous nos ami.e.s de la Commune, en direction du Mur des Fédérées.
Une dernière chose, nous avons retrouvé le vibrant hommage poétique de Bertold Brecht intitulé « Résolution des Communards » (voir les paroles en fin d’article); cette Résolution a été mise en musique et en images par des camarades Allemands (voir la vidéo).
LA SEMAINE SANGLANTE (21 MAI-28 MAI)
Bien sûr, les gardes nationaux de Passy battent le rappel ; bien sûr, depuis longtemps, des barricades de toutes sortes ornent carrefours et rues parisiennes, gardées par des fédérés (gardes nationaux), beaucoup de femmes et des enfants ; bien sûr, les femmes encore s’activent depuis longtemps pour coudre des sacs de sable qui, une fois remplis, renforceront les défenses. Mais les forces sont maintenant faibles et la discipline militaire en débandade.
Que vont pouvoir faire, en effet, 3 à 5 000 (voilà le résultat de toutes les erreurs !) combattantes et combattants contre 130 000 soldats, policiers et gendarmes, appuyés par une formidable artillerie et qui ont pour ordre de massacrer et d’arrêter tout ce qui ressemble à un ouvrier ou qui porte les fameux godillots de la Garde nationale? S’échapper est hors de question : les prussiens font barrage et remettent les fuyards aux versaillais.
Alors, une fois de plus, le peuple prend l’initiative du combat et fait preuve d’un héroïsme collectif et individuel extraordinaire. La résistance est acharnée.
Si l’on peut nommer les bataillons du 101ème, des Turcos, des Vengeurs de Flourens ou autres Pupilles de la Commune, c’est dans l’anonymat que les bataillons de femmes (notamment celui de la barricade de la place Clichy, composé de 120 femmes) ou d’enfants (celui de la barricade de la Porte Saint- Martin) et que des milliers d’ouvrières et d’ouvriers, d’employées et d’artisans préfèrent se faire tuer sur place plutôt que de céder devant l’ennemi. La technique enveloppante des versaillais freine devant les fédérés de Lisbonne, de Wroblewski ou encore du révolutionnaire polonais Dombrowski qui dirige la résistance sur la rive gauche. Mais celui-ci est tué au combat le 23 mai. Les fédérés perdent ainsi leur meilleur général et se replient.
D’autres encore, tels Eugène Varlin, Nathalie Lemel, Louise Michel, Elisabeth Dmitriev, Léo Fränkel, Jean-Baptiste Clément (l’auteur du Temps des Cerises), Jules Vallès, Benoît Malon, Lissagaray, etc. savent que leur place se trouve maintenant avec les leurs et on les verra jusqu’au bout sur les barricades.
Mais c’est dans une complète confusion que se mêlent les attelages, les bataillons qui refluent, les ordres, les appels aux armes, les faux espoirs, les rumeurs répandues par les flics et les mouchards qui pullulent, les explosions et les incendies causés par la guerre des obus et qui coûteront la vie à de nombreuses femmes du peuple au nom de la prétendue existence de «pétroleuses» incendiaires,….
Bientôt, les versaillais prennent à revers les barricades, empêchent les fuites et les foyers de résistances sont bientôt circonscris dans les quartiers populaires de Belleville, du faubourg du Temple et de la Bastille…
Pourtant il faudra encore quelques jours pour venir à bout du peuple parisien.
Les rescapés connus (Lissagaray, Vallès, Louise Michel, Maxime Vuillaume) rapporteront les nombreux actes héroïques de ces gens qui, pour beaucoup, n’avaient plus rien à perdre. D’autres, moins connues, comme Alix Payen ou Victorine Brocher, femmes du peuple, nous rappellent pourquoi les communards se battaient. Cette dernière a la possibilité de s’enfuir alors que ses camarades vont être massacrés. Un de ceux-là lui dit : «mettez en sûreté notre drapeau (…) si vous parvenez à fuir, gardez-le comme un trésor, et qu’il soit encore une fois à la tête des défenseurs du droit pour l’humanité, au cas où une révolution nouvelle surviendrait. »
********************** RÉSOLUTION DES COMMUNARDS CHANSON ALLEMANDE - Resolution der Kommunarden – Beertolt Brecht – 1950 (environ) Fait partie de la pièce de théâtre “Les jours de la Commune” (“Die Tage der Kommune”), écrite entre 1945-1950 par Bertolt Brecht. 1 1 Considérant notre faiblesse, vous avez fait Des lois qui doivent nous asservir. Que dans l'avenir les lois ne soient pas respectées! Considérant que nous ne voulons plus être serfs. Considérant que, alors, vous nous Menacez avec fusils et canons Nous avons décidé de craindre désormais Une mauvaise vie plus que la mort. 2 2 Considérant que nous restons affamés Si nous tolérons que vous nous volez Nous allons donc consigner que seules des vitres Nous séparent du bon pain qui nous manque. Considérant que, alors, vous nous Menacez avec fusils et canons Nous avons décidé de craindre désormais Une mauvaise vie plus que la mort. 3 3 Considérant que, là, s'élèvent des maisons Tandis que vous nous laissez sans demeure Nous avons décidé de nous y installer maintenant Parce que dans nos trous, ça ne nous convient plus. Considérant que, alors, vous nous Menacez avec fusils et canons Nous avons décidé de craindre désormais Une mauvaise vie plus que la mort. 4 4 Considérant: il y a trop de charbon Tandis que sans charbon nous avons froid Nous avons décidé d'aller le chercher maintenant Considérant que, alors, nous aurons chaud. Considérant que, alors, vous nous Menacez avec fusils et canons Nous avons décidé de craindre désormais Une mauvaise vie plus que la mort. 5 5 Considérant: vous n'arrivez pas À établir un bon salaire pour nous Nous reprenons maintenant nous-mêmes les usines Considérant: sans vous il y a bien assez pour nous. Considérant que, alors, vous nous Menacez avec fusils et canons Nous avons décidé de craindre désormais Une mauvaise vie plus que la mort. 6 6 Considérant que nous ne faisons pas Confiance au gouvernement, quoi qu'il promette Nous avons décidé de construire désormais Une belle vie sous notre propre direction. Considérant que, alors, vous nous Menacez avec fusils et canons Nous avons décidé de craindre désormais Une mauvaise vie plus que la mort. Considérant: vous écoutez les canons - Vous ne pouvez comprendre d'autre langage - Nous devons donc – si , si, cela vaudra la peine - Retourner les canons vers vous