22 mai 2024
Extraits d’une brochure d’Unité Communiste (membre, comme nous, de l’ICOR) ;
Pour lire en totalité: https://unitecommuniste.fr
…… En ouvrant le corps électoral de Nouvelle-Calédonie aux colons arrivés après 1998, cette loi menace non seulement d’étouffer électoralement le mouvement indépendantiste, mais surtout d’ouvrir la colonie au peuplement européen : une « recolonisation », pour reprendre les mots de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT).2
L’État bourgeois impérialiste n’hésite pas à changer les règles du jeu s’il n’en est plus le gagnant — par la force si nécessaire. Il ne reconnaît qu’une seule légitimité, celle de ses intérêts, et ne connaît qu’un langage, la contrainte.
La crise qui secoue actuellement la Nouvelle-Calédonie est révélatrice.
Dans les colonies se pose un problème universel : comment assurer l’hégémonie coloniale ? La réponse peut se résumer en une phrase : en transformant une minorité coloniale en majorité coloniale.
…………… Ce n’est ni plus ni moins que ce problème — celui de l’hégémonie coloniale — qui se pose aujourd’hui en Nouvelle-Calédonie. Derrière le problème du corps électoral provincial spécial, il y a le problème du colonialisme. L’enjeu, c’est de faire de la Nouvelle-Calédonie une simple partie de la nation française, aux dépens de la nation indigène.
Cela, personne ne l’exprime aussi clairement que Sonia Backès, présidente de la Province Sud et fer de lance du colonialisme en Nouvelle-Calédonie :
« Sans une intervention massive et urgente de l’État, nous perdrons le contrôle de la Nouvelle-Calédonie dans les prochaines heures, nous perdrons des vies (…) et la France perdra sa souveraineté »5
Le jour même, Mme Backès a été exaucée par le gouvernement de la métropole, lorsque celui-ci a décrété l’état d’urgence, avec l’envoi sur place du GIGN, du Raid et de CRS, pour un total de 1 000 policiers et gendarmes de métropole.
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En Nouvelle-Calédonie, l’état d’urgence a permis de réaliser 206 interpellations (chiffres officiels) dont celles de 10 dirigeants de la CCAT, perquisitionnés et assignés à résidence. La CCAT, qui rassemble plusieurs syndicats, partis et organisations politiques représentant l’aile radicale du mouvement de libération nationale kanak, est accusée par l’exécutif métropolitain de n’être « pas politique » mais « mafieuse », parce que selon lui responsable des violences.
Ce double standard colonial entre le « résistant » et le « terroriste » est si évident et récurrent que le dénoncer comme tel relève d’une banale tautologie. Il y a 70 ans en Algérie, ou il y a 8 mois en Palestine, celles et ceux qui résistent au destin auquel les condamne le colonialisme sont toujours salis par les discours coloniaux, réduit à des animaux enragés, et coupables de tous les crimes qu’ils ont subis et qu’ils subissent de la main de leurs accusateurs (racisme, terreur de masse, déplacement, massacre, génocide).
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Si l’État colonial joue son rôle, les colons aussi. Depuis le début des violences, ceux-ci se sont organisés en « milices armées » pour défendre leurs quartiers français, comme c’est notamment le cas de la Vallée-des-colons (tout est dans le nom), à Nouméa. Ces milices coloniales combattent les insurgés et érigent des barricades, en revendiquant parfois appliquer des « méthodes militaires »6, avec le soutien plein et entier de la police.7 Comme nous l’observons si clairement, dans la colonisation, il n’y a pas d’une part l’État colonial « actif » et les colons « passifs », mais un État et une population coloniales qui sont le prolongement l’un de l’autre.
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En métropole, nous faisons face à un consensus colonial délirant et hypocrite. Les témoignages qui sont relayés dans l’immense majorité des médias métropolitains ne sont que ceux des colons. Il y a un monopole du discours colonial en métropole qui ne permet qu’à une seule perception des évènements d’exister — celle des colons. Lorsque des néo-calédoniens non-français peuvent s’exprimer dans les médias métropolitains, ce n’est que si et parce qu’ils appellent « au calme », « au dialogue », etc. Cette situation médiatique n’a rien d’exceptionnel, c’est aussi celle que nous avons connue il y a 1 an, lors de la révolte des banlieues causée par l’assassinat de Nahel, ou que nous connaissons actuellement depuis plus de 6 mois concernant la résistance palestinienne. Même le social-impérialiste Mélenchon9, pourtant très modéré sur la question coloniale en général, et sur la question palestinienne et kanake en particulier, se voit accusé d’être un soutien ouvert du terrorisme par la majorité des discours politiques.
Notre rôle de communistes est aujourd’hui de soutenir la révolte des colonisés partout dans le monde, et notre devoir est de lutter en priorité contre « notre » propre impérialisme, et « notre » propre colonialisme ! Par tous les moyens, il faut développer notre solidarité internationaliste — du plus symbolique et occasionnel au plus concret et systématique.
Pour conclure, nous ne pouvons que souhaiter à la résistance kanake de se développer et de s’intensifier, et aux évènements récents de n’être que le début d’une nouvelle séquence historique plus radicale pour le mouvement de libération nationale kanak, vers une Kanaky libre et socialiste.
Dénonçons l’existence de la Nouvelle-Calédonie comme colonie française, la politique coloniale répressive dont est victime le mouvement de libération nationale kanak en général et la CCAT en particulier, et l’hypocrisie bourgeoise impérialiste qui les accompagnent ! Vive la résistance des colonisés ! Mort au colonialisme !
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2 « La Cellule de coordination des Actions de Terrain soutient le combat du peuple corse », Agence de presse nationale d’Azerbaïdjan, 1er mars 2024, à l’adresse suivante :
5 « Violences en Nouvelle-Calédonie : qu’est-ce que l’état d’urgence, dont l’instauration est réclamée par Sonia Backès, Nicolas Metzdorf et Georges Naturel ? », Franceinfo, 15 mai 2024, à l’adresse suivante :
6 « Émeutes en Nouvelle-Calédonie : “On a appliqué des méthodes militaires”, témoigne un habitant de Nouméa, qui tient une barricade “armée” », Franceinfo, 16 mai 2024, à l’adresse suivante :
7 « Anne-Claire, originaire de Haute-Vienne, témoigne depuis Nouméa : “Nous avons peur de tout perdre” », Le Populaire, 16 mai 2024, à l’adresse suivante :
9 Voir Du réformisme à l’opposition extra-parlementaire (2016-2017), à l’adresse suivante :
https://unitecommuniste.fr/wp-content/uploads/2024/04/Reformisme.pdf